Le Nard de l’Himalaya ou la redécouverte d’un savoir ancestral
Les nards sont à rapprocher des valérianes de nos contrées. C’est le nom commun à plusieurs espèces odoriférantes : le nard celtique des Romains, le nard syrien, enfin le nard indien (Nardostachys jatamansi) ou jatamansi, celui des parfumeurs, encore appelé le nard de l’Himalaya. Il est originaire du Népal et pousse sur les pentes enneigées entre 3500 et 5500 mètres d’altitude.
Ce sont les rhizomes séchés puis broyés qui sont utilisés en aromathérapie : ces rhizomes gris surmontés de fibres rougeâtres ont une odeur forte, persistante et balsamique. Leur saveur est amère. Leur distillation par entrainement à la vapeur d’eau fournit une huile essentielle de couleur brun clair et un hydrolat. La fleur est violette dans le prolongement des rhizomes, les feuilles poussent sur des tiges à part.
Le nard a un long compagnonnage avec les hommes. Son utilisation est très ancienne et reconnue comme sacré dans la tradition ayurvédique en Inde jusqu’à nos jours où une forme d’aromathérapie spirituelle renaît.
Le nard des Égyptiens et des Romains
On raconte que Imhotep qui vécut au troisième millénaire avant J.-C., médecin du pharaon Djoser, pratiquait la médecine en utilisant les plantes odoriférantes notamment l’ail, l’anis, la menthe, la myrrhe et le nard. En ces temps anciens, les temples égyptiens servaient non seulement de lieu d’études mais aussi de magasins aux produits aromatiques. On découvre sur leurs murs des hiéroglyphes qui nous révèlent les différentes formules des remèdes utilisés. Ainsi ses propriétés narcotiques et apaisantes aidaient à soulager les souffrances physiques et à calmer las souffrances psychiques.
Plus tard, Pline dans son Histoire naturelle décrit douze espèces de nard utilisées au cours de rituels religieux ou pour les embaumements.
On retrouve le nard chez Horace :
Un petit flacon de nard fera sortir une de ces amphores qui reposent maintenant dans les greniers de Suspicius, et qui ont la vertu de verser l’espérance à grands flots et de dissiper les amers soucis.
Si ces plaisirs te sourient, hâte-toi d’accourir, ton flacon à la main.
Je ne prétends pas d’abreuver de mes vins, comme le riche possesseur d’une maison opulente, sans rien en échange.
Hâte-toi, et trêve à l’avarice ; songe, tandis que tu le peux, au bûcher funèbre, et mêle à la sagesse un peu de folie : il est des moments où déraisonner est si doux !
Le texte fait référence à ces vins épicés dont les Romains rehaussaient le goût. On perd ainsi un peu de précieux épices, mais on gagne une amphore délicatement parfumée.
A la recherche de l’amphore perdue
Biochimiquement, l’huile essentielle de Nard contient des sesquiterpènes aux effets anti-inflammatoires, cicatrisants cutanés, fongicides et calmants ainsi que des cétones sesquiterpéniques aux effets hypothermisants et sédatifs. Les sesquiterpènes n’ont pratiquement aucune toxicité aux doses physiologiques et peuvent s’appliquer sur la peau sans la moindre irritation.
En langue hindoue, jatamansi signifie « esprit incarné ». Le nard a donc une action sur le corps physique mais aussi spirituel et émotionnel.
Son odeur ne laisse pas indifférent. Si elle peut éveiller chez certains des sensations de malaise ou de répugnance : une odeur de terre, d’humus mouillé ou en putréfaction, pouvant mettre en contact avec ses peurs enfouies, en poursuivant l’exploration, le Nard révèle son côté plus éthéré dégageant la sphère respiratoire haute. Enfin, en restant encore à l’écoute de ses sensations, nous pouvons percevoir un souffle qui descend jusqu’aux profondeurs du bassin, dont le réveil se traduit par une respiration plus ample en favorisant la descente du diaphragme et l’ouverture des basses côtes. L’énergie du Nard continue à descendre jusqu’à la plante des pieds répandant une sensation de présence. Peu à peu les peurs initiales s’estompent laissant un sentiment de plénitude en dehors du contrôle par notre mental. Nous nous ouvrons à la descente de l’esprit dans la matière.
Bien-sûr, chaque expérience est personnelle et peut-être légèrement différente dans le ressenti mais le voyage mérite pour ses multiples facettes d’ouvrir l’amphore.
Quelques synergies
En inhalation ou en massages, sur le chakra du cœur et la région du thymus, le Nard s’utilise avec la Rose, la Bergamote, le Néroli ou la Mélisse pour apaiser les souffrances et les angoisses de la psyché ou pour aider à dépasser ses peurs de solitude ou d’abandon.
En massage sur le ventre, le Nard calme les tensions abdominales en association avec le Géranium, l’Estragon ou le Basilic voire l’Angélique.
Et pour s’aider à habiter son corps pleinement, nous pouvons l’appliquer sur la plante des pieds en synergie avec la Cannelle, le Girofle, le Cèdre ou le Santal.
Pour conclure, petit avertissement pour nos lecteurs amoureux des chats : Théophile Gautier relate cette sorte « d’épilepsie extatique » que provoque l’odeur de la valériane chez le chat. L’huile essentielle de Nard de l’Himalaya peut provoquer une réaction encore plus forte, pulsionnelle voire incontrôlable et difficile à gérer selon le tempérament de votre compagnon. Évitez d’utiliser cette huile si vous ne souhaitez pas être pris pour un grattoir. Faites l’expérience en déposant une goutte sur son jouet en tissu…
Articles apparentés que vous pourriez aimer:
Herbe des Rois, une huile essentielle rare et mystérieuse
Laisser un commentaire
Participez-vous à la discussion?N'hésitez pas à contribuer!